De quoi Pessah est-il le nom ?

mahagada De quoi Pessah est-il le nom ?



La fête de Pessah est l’une des plus importante du calendrier religieux juif.

On y fête la libération de l’esclavage égyptien. Lors de la cérémonie du Seder, on rappelle cette histoire pour en tirer des leçons sur le présent et l’avenir des Juifs mais aussi de l’humanité entière.

Pour que les choses soient claires, bien sûr les évènements évoqués sont entièrement mythiques, n’ont aucune base archéologique ou historique. Mais comme la mythologie grecque ou indoue, comme les contes de fées, tout récit mythique donne lieu à une interprétation, une « morale ». C’est ainsi par exemple que les Noirs américains rompant les chaines de leur esclavage chantent le gospel « Let my people go ! » en s’inspirant de ce récit biblique. Et la tradition rabbinique interprète les appels à « effacer la mémoire d’Amalek » , une peuplade idôlatre non pas comme Netanyahou à exterminer les Palestiniens mais à lutter contre le mal qui est en nous 1

Dans la Torah , à de nombreuses reprises se trouvent ces injonctions, par exemple : «  Tu te souviendras que tu as été esclave au pays d’Égypte » (Deutéronome 5:15)« L’étranger qui séjourne parmi vous sera pour vous comme un des vôtres ; tu l’aimeras comme toi-même ; car vous avez été étrangers dans le pays d’Égypte ».(Lévitique 19 :34). La « morale » est limpide aussi : « nous » avons connu l’oppression, alors « nous » devons compassion et solidarité avec tous les opprimés.

L’essentiel du Seder consiste à lire la Haggadah, qui commence par cet appel : « Que celui qui a faim vienne et mange ! que celui qui est dans le besoin vienne fêter Pessah avec nous ». Alors ici et maintenant, nous pouvons inviter précaires, migrants sans-papiers, tous les exclus du système capitaliste. Et cet appel prend une résonnance particulière à l’heure où les Gazaouis, écrasés sous les bombes israéliennes manquent de tout, d’abris et surtout de nourriture.

La cérémonie est un rappel de ce fut la dureté de l’esclavage avec le plat du Séder comportant des herbes amères( pour l’amertume de l’esclavage), de l’eau salée ( pour les larmes versées) , du persil ou des radis ( pour le maigre repas des esclaves). Le pain y est interdit, on utilise des matzoth, des galettes de pain azyme, sans levain, à la fois le pain de la misère et de la liberté. On y récite des bénédictions, on chante des psaumes, les enfants demandent « Ma nichtana ? » ( pourquoi cette soirée est-elle différente des autres soirées )

Mais le Seder est aussi la vision d’une espérance : «  Ma maison, dit l’Eternel sera dénommée : maison de prières pour toutes les nations » (Isaïe 56 :7). Un autre prophète est à l’honneur ce jour : le prophète Elie . On remplit sa coupe, on ouvre grand la porte et tous les assistants se lèvent pour saluer l’hôte par ces mots «  Barou’h aba » ( soyez le bienvenu). Elie, c’est le prophète qui vient annoncer les temps messianiques, l’espérance d’un monde de justice et de paix. Pas seulement pour les Juifs, mais pour l’humanité entière :

« Il arrivera, dans la suite des temps que la montagne de la maison du Seigneur sera établie et toutes les nations y afflueront. […] Il sera le juge des nations, l’arbitre d’un grand nombre de peuples. De leurs glaives ils forgeront des socs de charrue et de leurs lances des faucilles ; une nation ne tirera plus l’épée contre une autre, et l’on n’apprendra plus la guerre. » (Isaïe 2,2-4).

C’est bien là le sens profond des paroles « Lechanah haba vi yerouchalaïm » ( L’année prochaine à Jérusalem )  que l’on prononce à la fin du Seder : « Vivement que le Messie arrive ». Et non pas bien sûr : « Allons créer un Etat « juif » en y chassant les habitants indigènes » . S’il fallait les prendre au sens littéral, tous les juifs qui les prononcent prendraient leur billet pour Tel-Aviv2.

Récit mythique et réalité se télescopent en ces lieux chargés de symboles. Le Pharaon qui persécute actuellement , c’est Netanyahou et sa bande de génocideurs. Les Hébreux sous le joug égyptien puis errant dans le Sinaï, ce sont maintenant  les Palestiniens menacés d’y être chassé dans ce même désert . Ce ne sont plus des mythes, c’est l’horrible actualité. Mais Juifs et Palestiniens ont la même espérance pour une paix juste sur cette terre que l’on dit « sainte » :  égalité des droits pour tous de la Méditerranée au Jourdain !











Note-s

  1. « Amalek est vivant aujourd’hui, bien que sous une forme différente. Ce n’est plus une nation étrangère, Amalek est aujourd’hui est un ennemi interne. Nous avons tous un Amalécite qui se cache en nous» cf : https://fr.chabad.org/library/article_cdo/aid/3608053/jewish/Effacer-Amalek-aujourdhui.htm []
  2. cf « Au nom de la Torah, une histoire de l’opposition juive au sionisme » de Yakov Rabkin, page 85 : « Je me souviens d’une fête juive que j’ai célébrée avec un ami à Boston dans les années 1970. Dans I’après-midi nous nous sommes joints à un groupe de hassidim qui, dans un parc public, dansaient et s’exclamaient avec une joie et une confiance rayonnante : «L’an prochain à Jérusalem ». « Mais ils n’ont qu’à acheter un billet d’avion et ils y seront », s’étonna mon ami, actuellement professeur à Berkeley. Ce que faisaient les hassidim pourrait paraitre paradoxal à un observateur étranger à la tradition juive. Celui-ci interpréterait ce désir articulé par les juifs depuis deux millénaires comme une formalité, voire une hypocrisie. Or, avec un peu de sensibilité culturelle on verra qu’il est déplacé de donner une interprétation littérale à ce que clament les juifs dans leurs prières: retour à Jérusalem. Ce qu’ils cherchent est plutôt une perfection messianique, I’arrivée d’un monde meilleur qui comprendrait, entre autres, un retour – opéré par Dieu – du peuple d’Israël à la Terre d’Israël.[]
    Voir le-s sujet-s Judaïsme - Judéité
    Tous les dossiers