« Une terre sans peuple pour un peuple sans terre » : cette phrase qui date du XIXème siècle a été utilisée pour justifier la colonisation de la Palestine. Pour les sionistes, la Palestine était une « terre sans peuple ». Les gens qui l’habitaient ont été qualifiés « d’Arabes ». Les nouveaux colons ont répandu l’idée que ces autochtones constituaient un mélange de populations diverses amenées là par les Ottomans. Ils n’avaient donc aucun droit à rester sur cette terre et le sionisme a été d’entrée un colonialisme de remplacement visant à expulser la population autochtone et à la remplacer par de nouveaux immigrants.
Israël est né d’un déni. Déni de l’existence, des droits et de la dignité du peuple palestinien. Déni du nettoyage ethnique prémédité de 1947-49. Dès la création de l’État d’Israël, les dirigeants israéliens ont répandu une légende tenace : « les Arabes sont partis d’eux-mêmes ». Pour bien convaincre le monde entier, ils ont interdit le retour des réfugiés, et entrepris d’effacer les traces de la Palestine en détruisant les villages et en changeant des noms des lieux.
« Qui sont les Palestiniens ? Je ne connais personne de ce nom. Ils n’existent pas ». Cette déclaration de Golda Meïr, ancienne Première Ministre « socialiste », date de 1969. Les troupes israéliennes venaient de conquérir la Cisjordanie et Gaza. Elles dominaient désormais un pays sans habitants « légitimes » puisqu’il n’y a pas de Palestiniens. La colonisation pouvait commencer. Désormais, 800 000 colons habitent au-delà de la ligne verte, la frontière internationalement reconnue.
Comment la communauté internationale a-t-elle pu être dupée à ce point ? Considérer Israël comme un « État juif et démocratique » alors qu’il n’était démocratique que pour les Juifs et qu’il occupait et colonisait, allant même jusqu’à nier l’existence du peuple occupé.
Du déni, on est passé au négationnisme, mot employé à dessein. Quand Shlomo Sand a écrit « Comment fut inventé le peuple juif », un obscur David Horowitz a écrit « Comment fut inventé le peuple palestinien », reprenant l’idée que cette « notion » de peuple palestinien était une invention des années 60. Citons-le : « L’invention du peuple palestinien eut, et a toujours, un dessein très clair : la volonté politico-existentielle de détruire l’État d’Israël ». Dans d’autres versions, c’est le KGB qui aurait inventé le terme « palestinien ». Et ces « Arabes » seraient un mélange d’Algériens, d’Albanais, de Bosniaques, de Soudanais, de Tcherkesses … installés là récemment. Le déni est sans limite.
Donc quand Bezalel Smotrich, ministre des finances de Nétanyahu, explique que le peuple palestinien est une invention, en l’occurrence il n’invente pas. Il reprend ce qu’on inculque aux Israéliens dès l’enfance. Ce qui change, c’est que Smotrich est un fasciste, qu’il « urine du haut du plongeoir » pour reprendre une expression courante en Israël et popularisée par Sylvain Cypel. Avec lui, plus de faux-semblant. Le suprémacisme est assumé, cette terre est juive et les « Arabes » seront enfermés, tués ou chassés. La « communauté internationale » qui a fermé les yeux ou favorisé le rouleau compresseur colonial est embarrassée. Avec Smotrich, la fable des deux États s’écroule. Elle est même irresponsable : Macron a reçu Nétanyahu et il n’y a eu aucune réaction à l’interdiction du voyage au Proche-Orient de Josep Borrell, ministre des Affaires étrangères de l’Union Européenne.
Les centaines de milliers de manifestants de Tel-Aviv qui dénoncent sans relâche le fascisme, l’intégrisme et la corruption n’ont pas le choix. Ils doivent rompre avec le déni, reconnaître que les Palestiniens existent et que le droit international doit s’appliquer aussi à eux : fin de l’occupation, de la colonisation, destruction du mur, fin du blocus de Gaza, libération des prisonniers, égalité des droits pour tous, droit au retour des réfugiés.
La Coordination nationale de l’UJFP le 28 mars 2023