En quoi la négation du génocide des Juifs constitue-t-elle un soutien aux Palestiniens ?
Des négationnistes dans le mouvement de soutien aux Palestiniens. Il fallait s’y attendre, et cela pour deux raisons :
1- l’instrumentalisation du génocide par le sionisme qui y a vu un moyen de convaincre les Juifs de rallier le sionisme et de rejoindre “ leur refuge naturel ”, l’Etat d’Israël.
2- le développement d’un discours antijuif arabo-musulman emprunté à l’histoire européenne, ce que l’on peut considérer comme un effet, sinon une victoire, de l’impérialisme culturel occidental.
Le génocide est devenu un argument politique pour justifier la politique israélienne. D’où les réactions de ceux qui croient contrer l’argumentation sioniste en niant un génocide qui aurait été inventé par ce mouvement pour mieux justifier son agression contre les Palestiniens. D’autant que, en concentrant une part de son activité sur la mémoire du génocide, le mouvement sioniste savait qu’il faisait d’une pierre deux coups. D’une part il rappelait aux Juifs qui tardaient à (re)venir dans leur pays qu’ils vivaient toujours sous le risque d’une nouvelle Shoah, d’autre part il rappelait à ses alliés qu’ils restaient toujours suspects d’antisémitisme et qu’ils devaient donner des gages de bonne conduite à ceux qui se sont autoproclamés les représentants exclusifs des Juifs dans le monde.
Face à ces manœuvres, il était tentant de chercher à démonter la mauvaise foi sioniste en empruntant au discours antisémite européen les arguments permettant, une fois pour toutes, de convaincre de la mauvaise foi de l’ennemi. Le négationnisme arrive à point pour dénoncer la manœuvre qui serait le fait, non seulement du sionisme, mais plus généralement des Juifs considérés dans leur ensemble. On peut alors opposer à l’instrumentalisation de la mémoire par le sionisme et ses sympathisants la souffrance des Palestiniens.
Ces deux discours, le sioniste et le négationniste, se confortent l’un l’autre.
Dans cette affaire, seules les victimes ne comptent pas, que ce soient les Juifs exterminés par les nazis ou les Palestiniens massacrés par l’Etat d’Israël.
Face à cette double mauvaise foi nous devons expliquer
– d’abord, que les atrocités nazies, et en particulier le massacre systématique des Juifs, ne donnent aucun droit, à ceux qui se réclament d’un obsessionnel devoir de mémoire, de perpétrer des crimes contre les Palestiniens, que l’injustice de 1948 ne saurait être le prix à faire payer aux habitants de la Palestine pour un crime commis en Europe par des Européens.
– ensuite, qu’on ne soutient pas la dure lutte des Palestiniens en niant un crime sous prétexte que c‘est au nom de ce crime que le sionisme justifie ses crimes d’aujourd’hui. Rappelons que des personnalités palestiniennes (Mahmoud Darwich, Edward Saïd, Elias Sanbar) se sont opposés en 2001 à un colloque négationniste à Beyrouth.
– enfin, que ce n’est pas parce que certains dévoient la lutte contre le sionisme qu’il faut refuser toute critique du sionisme. Nous ne pouvons accepter que l’on mette sur le même plan la mascarade négationniste de Téhéran et les discours antisionistes.
Lorsque nous dénonçons l’équation “ juif = sioniste ” utilisée à la fois par les défenseurs inconditionnels de la politique israélienne et par les antisémites et les négationnistes, nous dénonçons autant ceux qui attaquent en bloc les Juifs au nom de la lutte contre le sionisme que ceux qui, sous prétexte de lutte contre l’antisémitisme, se font les inconditionnels du sionisme (ainsi la pétition d’Elie Wiesel, Alain Finkielkraut et quelques autres qui appellent à des sanctions contre l’Iran).
Bureau national de l’UJFP, le 17 décembre 2006