23 novembre 2011
Le jugement rendu par le tribunal administratif de Montreuil, le 22 novembre, interdisant à une mère de confession musulmane de l’école élémentaire Paul Lafargue de Montreuil de participer aux sorties scolaires, parce qu’elle porte un foulard est un jugement inique.
Il constitue une discrimination scandaleuse à l’égard d’une mère parce qu’elle est musulmane. Ce jugement contrevient aux principes de laïcité édictés dans la loi de 1905, qui institue la liberté de croyance et de conscience pour tous, quelle que soit la religion ou l’absence de religion et n’instaure le principe de neutralité que pour les agents de l’Etat.
En assimilant cette mère à un membre du personnel de l’Etat – alors que les sorties scolaires s’effectuent sous la responsabilité des enseignants, eux, agents de l’Etat–, ce jugement légalise une discrimination religieuse et constitue, de fait, une discrimination raciste. Car jamais un telle décision n’a été prononcée à l’encontre d’une mère portant une croix ou d’un père portant une kipa.
Pourtant le Premier ministre François Fillon s’était opposé, en juin dernier, à un projet de circulaire du ministre de l’Education nationale, Luc Chatel qui voulait généraliser cette interdiction à toute l’Education nationale.
Le ministre de l’Intérieur, Claude Guéant, avait réaffirmé, à la rentrée sa volonté de ne pas remettre en cause la loi de 1905, selon lui «équilibrée». Et ne pas vouloir légiférer sur la participation des mères portant un voile aux sorties scolaires.
A Montreuil, seule l’école élémentaire Paul Lafargue pratique ces discriminations. Dans la maternelle du même établissement, toutes les mères sont bienvenues pour accompagner les sorties scolaires. Dans les autres écoles de la ville, les mères musulmanes, quels que soient leurs vêtements, peuvent accompagner les enfants. Tous ces enseignants seront-ils désormais considérés hors-la-loi?
Le collectif Mamans-toutes-égales, soutenu par des intellectuels (1), des responsables politiques et syndicaux (2), des associations antiracistes et musulmanes, tient à alerter l’opinion publique sur la gravité de telles discriminations, leur retombées sur les enfants des mamans exclues et au-delà sur tous les enfants.
Ce jugement légalise l’exclusion. Il encourage les attitudes racistes et les pratiques discriminatoires à l’encontre de populations éternellement perçues comme « issues de l’immigration » alors qu’elles appartiennent à la société française. Il institue, de fait, une catégorie de Français à part, soumis à des règlements et jugements d’exception, hors du droit commun.
Notes
(1) Jacques Rancière, philosophe ; Etienne Balibar, philosophe ; Esther Benbassa, historienne ; Joël Roman, philosophe ; Françoise Vergès, politologue, Eric Fassin, sociologue, Jean Bauberot, sociologue, Christine Delphy, sociologue…
(2) Christiane Taubira, Cecile Duflot, Patrick Braouzec, Olivier Besancenot, Alima Boumedienne Thiéry, Eric Favey, secrétaire national adjoint de la Ligue de l’Enseignement, Annick Coupé