Commémoration du 17 octobre 1961 : appels du collectif « Vérité et Justice » et du collectif citoyen d’Argenteuil

17 octobre 1961 – 17 octobre 2017
56ème Anniversaire – Vérité et Justice

Le 17 octobre 1961, des dizaines de milliers d’Algériens manifestaient pacifiquement à Paris contre le couvre-feu discriminatoire qui leur avait été imposé par Maurice Papon, préfet de police de Paris et le Gouvernement de l’époque. Ils défendaient leur droit à l’égalité, leur droit à l’indépendance et le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes. Ce jour-là, et les jours qui suivirent, des milliers de ces manifestants furent arrêtés, emprisonnés, torturés – notamment par la « force de police auxiliaire » – ou, pour nombre d’entre eux, refoulés en Algérie. Des centaines perdirent la vie, victimes d’une violence et d’une brutalité extrêmes des forces de police.

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56 ans après, la Vérité est partiellement en marche. Cependant, la France n’a toujours pas reconnu sa responsabilité dans les guerres coloniales qu’elle a menées, – en particulier la Guerre d’Algérie – non plus que dans le cortège de drames et d’horreurs qu’elles ont entraînés, comme ce crime d’Etat que constitue le 17 octobre 1961. Le 17 octobre 2012, le Président de la République avait certes fait un premier pas important, en déclarant : « Le 17 octobre 1961, des Algériens qui manifestaient pour le droit à l’indépendance ont été tués lors d’une sanglante répression. La République reconnaît avec lucidité ces faits.

Cinquante et un ans après cette tragédie, je rends hommage à la mémoire des victimes. » Mais le terme de crime n’est pas repris, et la responsabilité, sous entendue, n’est pas clairement définie. Nous demandons une parole claire aux autorités de la République, au moment où certains osent encore aujourd’hui continuer à parler des « bienfaits de la colonisation », à célébrer le putsch des généraux à Alger contre la République, à « honorer » les criminels de l’OAS.

Lors de ce rassemblement, une nouvelle plaque sera symboliquement apposée avec l’inscription suivante: “ A la mémoire des centaines d’Algériens tués lors des manifestations pacifiques du 17 octobre 1961 par des policiers agissant sous l’autorité du préfet Maurice Papon.  »

Reconnaissance de ce crime d’Etat.

Dans ce domaine, il est donc nécessaire que des mesures significatives soient prises : – Que la création d’un lieu de mémoire voué à cet évènement, demandée dans la résolution votée par le Sénat en octobre 2012 qui reconnaissait elle aussi ce massacre, soit rapidement mise en œuvre par les autorités de l’Etat, de la Ville de Paris et la Région Ile-de-France
– Pour être fidèles à leur mission scientifique, les historiens ont besoin de pouvoir accéder librement aux archives, échapper aux contrôles des pouvoirs ou des groupes de pression et travailler ensemble, avec leurs homologues de l’autre rive de la Méditerranée.
– La vérité doit être dite sur l’organisation criminelle de l’OAS que certains, comme à Béziers avec le Maire Robert Ménard, et au sein de l’ancienne majorité présidentielle veulent la réhabiliter.

Ce n’est qu’à ce prix que pourra disparaître la séquelle la plus grave de la Guerre d’Algérie, à savoir le racisme, l’islamophobie dont sont victimes aujourd’hui nombre de citoyennes et citoyens, ressortissants d’origine maghrébine ou des anciennes colonies, y compris sous la forme de violences policières récurrentes, parfois meurtrières.

On ne construit pas la démocratie sur des mensonges et des occultations. Après plus d’un demi-siècle, il est temps :
– Que le Président de la République, au nom de la France, confirme, par un geste symbolique, la reconnaissance et la condamnation de ce crime d’état.
– que l’Etat français reconnaisse sa responsabilité dans l’internement arbitraire, pendant la Guerre d’Algérie, d’Algériens dans des camps.
– que la liberté d’accès aux archives soit effective pour tous, historiens et citoyens.
– que la recherche historique sur ces questions soit encouragée, dans un cadre franco algérien, international et indépendant.


A l’occasion de ce 56ème anniversaire, nous exigeons Vérité et Justice.
Rassemblement le 17 Octobre 2017 à 18heures au Pont Saint Michel à PARIS


Signataires au 12 octobre 2017

Associations : 4 ACG (Anciens Appelés en Algérie et leurs Amis Contre la Guerre), 17 octobre 61 contre l’oubli, 93 au Cœur de la République, Amis de l’Algérie Rennes, Association Culturelle Les Oranges, ACCA (Association Contre le Colonialisme Aujourd’hui), ACDA (Association pour le changement et la démocratie en Algérie), AFAPREDESA (L’Association des Familles des Prisonniers et Disparus Sahraouis) AFASPA (Association Française d’Amitié et de Solidarité avec les Peuples d’Afrique), Fondation Frantz Fanon, Les Amis de Max Marchand, de Mouloud Feraoun et de leurs
Compagnons, APCV (Association de promotion de la culture et du Voyage), ATMF
(Association des Travailleurs Maghrébins de France), ANPROMEVO (Association
Nationale pour la Protection de la Mémoire des Victimes de l’OAS), Au Nom de la Mémoire, ARAC (Association Républicaine des Anciens Combattants), Comité Vérité et Justice pour Charonne, CDISCOM (Collectif de Défense de l’Intégrité et de la Souveraineté des Comores). C-O10MAI (Comité d’Organisation du 10 Mai), CRAN (Conseil Représentatif des Associations Noires), FARR (Franco Algériens Républicains Rassemblés), FNACA de Paris (Fédération Nationale des Anciens Combattants en Algérie, Maroc et Tunisie), FTCR (Fédération des tunisiens pour une Citoyenneté des deux Rives), Harkis et droits de l’Homme, LDH (Ligue des Droits de l’Homme), MIR(Mouvement International pour les Réparations), (MRAP (Mouvement contre le Racisme et pour l’amitié entre les peuples), Le Paria, Sortir du Colonialisme, SURVIE, UJFP (Union Juive Française pour la Paix),…

Organisations Syndicales : CNT-f (Confédération Nationale du Travail ), SNES (Syndicat National des Enseignements du second Degré), Union Syndicale Solidaires, URIF-CGT (Union Régionale Ile de France de la CGT),

Partis politiques : Alternative Libertaire, ECOLOGIE Sociale, Ensemble!, M1717 (Mouvement du 1er juillet), NPA (Nouveau Parti anticapitaliste), PCOF (Parti Communiste des Ouvriers de France), PCF (Parti Communiste Français), PG (Parti de Gauche).


Des morts sans sépulture

Par le Collectif citoyen « 17 octobre 1961 » d’Argenteuil pour la 56ème commémoration.

Mardi 17 Octobre 2017 à Argenteuil.

A 19h, Hommage aux morts sur le Pont d’Argenteuil.

A 20h, Projection du film « Les balles du 14 Juillet 1953»
de Daniel Kupferstein à la Maison des jeunes, 3 rue des Gobelins.

Un jour d’octobre 1961, la Seine a rougi d’un crime d’État.

Depuis, dans le silence et l’obscurité de ce même État, des femmes et des hommes meurtris par leur dignité arrachée se souviennent. Chaque 17 du dixième mois de chaque année, ils se retrouvent sur un pont qui enjambe la mémoire de l’eau.

Avec des fleurs à la main, avec le regard perdu au loin pour laisser réémerger ces morts sans sépulture, ils et elles témoignent. De pont en pont, d’Argenteuil à Nanterre, de Colombes à Gennevilliers, ils tissent les souvenirs avec le fil de la justice.

Rien, pas même le temps qui emporte les chibanis et les chibanias, ne dissout l’horreur perpétrée par l’État français. Rien, parce que tout nous y renvoie : des crimes policiers qui visent d’abord les enfants héritiers de l’immigration aux meurtres de milliers de migrants, organisés chaque année par la France et les autres gouvernements de l’Union Européenne. Des migrants qui fuient la misère et la guerre orchestrées par l’Occident.
Hier la Seine, aujourd’hui la Méditerranée, à son tour devenue le plus grand cimetière sans sépulture.

Rien ne nous fera oublier car tout fait écho au prix payé par ces Algériens et Algériennes qui se battaient pour l’indépendance.

Rien ne nous fera oublier car d’autres peuples sous d’autres latitudes se battent pour la même indépendance et subissent les mêmes crimes racistes coloniaux, impérialistes.

Rien ne nous fera oublier car sur les murs d’Argenteuil, l’affiche de monsieur Ali Ziri, même défraîchie avec le temps, résiste aux vents mauvais. Ali, 69 ans, tué par la police nationale un jour de printemps 2009, avait 20 ans ce jour d’automne 1961. Il savait ce que la police avait fait, il n’imaginait pas ce qu’elle ferait encore tant d’années plus tard. Là encore, lorsqu’il s’agira de condamner la police nationale, ses proches entendront la justice prononcer : « non-lieu ».

D’hier à aujourd’hui, nous poursuivons ce chemin de larmes et de recueillement car la douleur gronde encore dans nos corps. Mais nous poursuivons ce chemin de dignité en exigeant la reconnaissance de ces crimes d’État et la condamnation de l’État.
Nous ne voulons plus de ces plaques de rues, de places ou de ces frontons d’écoles et autres institutions d’Etat portant le nom d’esclavagistes et de colonialistes.

Il est temps de rendre hommage à celles et ceux qui ont mis leur vie au service de la lutte pour l’égalité et la dignité.

Ce 17 octobre, nous le ferons pour eux, parce qu’ils nous ont faits.

Argenteuil, 1er octobre 2017.

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