Une émission de télévision où était invitée une survivante d’Auschwitz-Birkenau a donné lieu à une polémique où le suprématisme blanc mâtiné de philosémitisme a encore sévi.
Ginette Kolinka, déportée de Paris à l’âge de 19 ans en 1944, avec son père, son frère et son neveu qui ne sont pas revenus, a longtemps refoulé les souvenirs du camp, mais s’est mise assez récemment à témoigner, notamment dans les établissements scolaires. Agée aujourd’hui de 94 ans, elle a écrit, avec la journaliste Marion Ruggiéri, un livre qui vient d’être publié chez Grasset, dans lequel elle fait part de son expérience. Invitée à l’émission de Laurent Ruquier, avec quelques têtes en vue du monde des écrans, elle a répondu aux questions de ces célébrités avec beaucoup de naturel.
Christine Angot, écrivaine, l’a harcelée de questions, parfois gênantes, mais auxquelles Ginette Kolinka a opposé une bonne humeur à toute épreuve.
Ensuite, Christine Angot a cru bon de faire des déclarations insensées, citées dans un blog de Mediapart (03/06/19-GTK), que voici :
Avec cette concurrence des mémoires, cette chose, il ne faut pas de concurrence, tout le monde a souffert et les souffrances sont toutes à égalité, à force de vouloir indifférencier les uns et les autres et bien ça conduit à l’indifférence de ce qu’a vécu un groupe de personnes ou une personne en particulier. On l’a rappelé par exemple, tout à l’heure avec Ginette Kolinka, en parlant de camp de concentration ou de camp d’extermination ; le but avec les Juifs, pendant la guerre, ça a bien été de les exterminer, c’est-à-dire de les tuer. Et ça introduit par exemple une différence fondamentale, alors qu’on veut confondre, avec par exemple l’esclavage, l’esclavage des noirs envoyés aux États-Unis etc., ou ailleurs. C’était exactement le contraire. L’idée c’était qu’ils soient en pleine forme, en bonne santé pour qu’ils soient commercialisables. Non ce n’est pas vrai que les traumatismes sont les mêmes, non ce n’est pas vrai que les souffrances infligées aux peuples sont les mêmes. Et c’est bien pour ça qu’on doit être attentif, chaque fois, au détail, à la particularité, et le roman (de FOG) permet ça.
Ainsi, tout en s’élevant contre la concurrence des victimes, voici qu’elle ne trouve pas mieux que de décerner la médaille de la souffrance aux juifs et de comparer le génocide à quoi ? … tiens, pas exemple, au hasard, à l’esclavage. Et de s’enfoncer dans l’innommable en évoquant des Africains déportés mais bien nourris, maintenus en pleine forme, en bonne santé, par les esclavagistes.
Ou bien cette énormité relève d’une ignorance crasse de la condition des esclaves exterminés à petit feu (ou à gros) par la civilisation blanche internationale (l’Afrique a quand même perdu des millions de femmes, d’enfants et d’hommes avec la traite), ou bien c’est juste le cri de haine de celles et ceux qui sont encore et seront toujours englués dans cette mentalité coloniale et esclavagiste. Il en faut une bonne dose pour oser dire que les souffrances infligées aux peuples ne sont pas les mêmes et de mépriser à ce point la tragédie qui a vidé l’Afrique de ses forces vives et qui a fait la richesse de la France, du Royaume Uni, des États Unis et de quelques autres.
Nous qui luttons contre tous les racismes, avons fort à faire quand des représentants patentés de la culture française se vautrent dans l’ignominie et sont prêts aux mensonges les plus gros pour ressasser leur bien pensance sur la gravité suprême du génocide nazi. Il est de bon ton aujourd’hui d’aimer les juifs et d’empathiser sur leur souffrance. Mais ce sont les mêmes ou leurs aïeux qui naguère les traînaient dans la boue et faisaient du zèle auprès des nazis.
Sonia Fayman, fille de résistant déporté