L’UJFP partage cette tribune signée par plus de 500 enseignants et chercheurs pour défendre la liberté académique. Alors que Laurent Wauquiez et la Région se sont violemment attaqués à l’université Lyon 2, ils espèrent faire poids localement face aux assauts répétés de l’extrême droite et la droite : institutionnelle contre les universités.
[TRIBUNE] Depuis plusieurs mois, nous assistons à une accélération et un durcissement des attaques contre la liberté d’expression d’étudiants et d’universitaires, mais également d’acteurs politiques, syndicaux, associatifs et plus généralement de toutes celles et tous ceux qui se lèvent contre le massacre du peuple palestinien à Gaza et en Cisjordanie, contre l’expansionnisme israélien dans la région ou, plus simplement, qui tentent d’informer sur ce qui se passe au Proche-Orient.
Dénoncer ce que la Cour internationale de Justice qualifiait, dès janvier 2024, de « risque plausible de génocide », expose à la répression d’État et au déchaînement de la droite et de l’extrême-droite, alors que pour de nombreux observateurs, tant associatifs que politiques ou universitaires, nous sommes passés de la plausibilité à la réalité du génocide.
Depuis fin mars, c’est l’Université Lumière Lyon-2 dans son ensemble qui est visée par des attaques insensées. Après plusieurs conférences étudiantes censurées sur pression de la Préfecture l’année passée et un mouvement étudiant réprimé à Sciences-Po Lyon, ce sont désormais les responsables d’établissement qui sont visés, avec la complicité du Gouvernement.
Pour les chercheurs : de violentes attaques d’élus contre l’université Lyon 2
Alors que la présidente de Lyon-2 était menacée de mort et placée sous protection policière, l’ex-président de Région, décrétait la suppression des financements de la Région pour cet établissement. Dans le même temps, Willy Beauvallet-Haddad, maître de conférences en science politique, subissait des attaques politico-médiatiques et sur les réseaux sociaux pour ses prises de position personnelles sur le Proche-Orient qui l’ont contraint à démissionner de son poste de vice-président auquel il venait d’être réélu, alors même que la qualité de son travail était largement reconnue en interne.
Ces évènements s’inscrivent dans un climat délétère d’institutionnalisation de la répression de toutes les voix en soutien aux Palestiniennes et Palestiniens, en particulier dans les universités. La droite institutionnelle, en rejoignant les thèses de l’extrême droite, remet directement en cause nos libertés fondamentales, individuelles et collectives, à commencer par la liberté d’expression.
Derrière les paniques morales alimentant la dénonciation de « l’islamo-gauchisme », de « l’islamo-wokisme » et désormais de « l’entrisme » comme autant de fantasmes relayant les thèses islamophobes du « grand remplacement », c’est aussi l’indépendance même du champ académique et l’autonomie de la vie démocratique des établissements d’enseignement supérieur qui sont menacées.
Respect du droit international
La défense du droit international, le respect de l’autodétermination des peuples et de l’égale dignité des individus sont pourtant des boussoles indispensables à la formation des citoyennes et citoyens, à la construction de nos sociétés et du monde qui nous entoure. L’empathie elle-même pour les peuples menacés d’effacement, quels qu’ils soient, ne saurait être condamnée ou condamnable.
Alors que celles et ceux qui nous harcèlent, qui tentent de ternir notre réputation, qui nous traînent devant la justice, ont assumé sans état d’âme leur complicité active ou passive avec des dirigeants israéliens poursuivis par les instances internationales pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, nous dénonçons fermement une fuite en avant qui nous rapproche, étape après étape, des heures les plus sombres de l’histoire du continent européen.
Dans ce contexte, nous appelons chacune et chacun à ne pas céder à la peur et à l’intimidation, à défendre la liberté d’expression et les libertés académiques qui nous concernent toutes et tous comme citoyens, comme enseignants et chercheurs, et à soutenir notre collègue Willy Beauvallet-Haddad comme toutes celles et ceux qui sont victimes d’attaques similaires contre leur droit à s’exprimer.
Plus de 600 signatures
À l’heure où nous écrivons ces lignes, la tribune, à l’initiative du collectif Palestine Lyon Universités Solidaires (PLUS), a été signée par plus 600 personnes, dont une majorité d’enseignants et chercheurs, issus des universités et centres de recherches lyonnais (Lyon-1, 2 et 3, ENS, Sciences-Po, CNRS…) et de toute la France. Plusieurs député.es du Rhône sont également cosignataires. La tribune est ouverte à tous via ce lien. Nous retranscrivons ici la liste des 50 premiers signataires.
1. Tuna Altınel, Maître de conférences (MCF) en Mathématique (Lyon 1/Institut Camille Jordan)
2. Alain Mille, Professeur émérite d’Informatique (Lyon 1/ Liris)
3. Jwana Chahoud, Enseignante-Chercheuse, Lyon 2
4. Bruno Paoli, Professeur des universités (PU), Université Lumière Lyon 2
5. Emilie Lanciano, PU, Sciences de Gestion, Université Lyon 2,
6. Louafi Bouzouina, Directeur de recherche (DR) en sciences économiques (ENTPE/LAET)
7. Daniel Thin, Professeur honoraire de sociologie (Lyon 2/Triangle)
8. Sbeih Sbeih, Docteur en Sociologie, ATER (Lyon2/CMW)
9. Mariette Ballon, Doctorante en Science politique (Lyon 2/Triangle)
10. Yassir Benhima, Professeur d’islamologie et d’histoire de l’Islam médiéval, Lyon 2-CIHAM
11. Marie Fare, MCF, Economie
12. Sylvain CELLE, Mcf, économie, Université Lyon 2
13. Stéphane VALTER, Professeur des universités à Lyon 2 et membre de l’Académie des sciences d’outre-mer (Paris)
14. Rawad CHAKER, Maître de conférences en Sciences de l’Education et de la Formation, Université Lyon 2
15. Christian VELUD, MCF Histoire
16. Julien Théry, PU, Univ. Lumière Lyon 2
17. Thomas Blossier, MCF Mathématiques, Université Lyon 1
18. Michel MIETTON, Professeur émérite Université de Lyon 3
19. Benaziza Sabrina, Doctorante Lyon 2
20. Sonia Dayan-Herzbrun, Professeure émérite Université Paris Cité
21. Fabien NAVARRO, MCF en Mathématiques appliquées, Paris 1
22. Michael HARRIS, Professeur émérite de mathématiques, Université Paris-Cité
23. Ahmed Abbes, Directeur de recherche au CNRS, IHES
24. Rachele Borghi, MCF, géographie, Sorbonne Université
25. Christine Charretton, MCF Mathématique à la retraite, Lyon1
26. Christophe BENECH, Chercheur CNRS, Archéorient
27. Dror WARSCHAWSKI, Chercheur, Biophysique, CNRS
28. Ivar EKELAND, Ancien président de l’Université Paris-Dauphine
29. Gilles Raveneau, Professeur d’université, anthropologie, Université Lumière Lyon 2
30. Joseph Oestermé, Professeur émérite, Sorbonne Université
31. Sylvie MONCHATRE, PR, Sociologie, Université Lumière Lyon 2
32. Guillaume GOURGUES, MCF science politique, Lyon 2
33. Chérif Ferjani, Professeur honoraire classe exceptionnelle, science politique, université Lyon 2
34. Michaël Assous, Professeur des universités, sciences économiques, université Lumière-Lyon 2
35. Olivier GIVRE, MCF, anthropologie, université lumière Lyon 2
36. Anne VERJUS, Directrice de recherche, CNRS, Lyon
37. Hervé Gazel, MCF Géographie-Aménagement Université Jean Moulin Lyon 3
38. Fatiha BELMESSOUS, Chercheure en histoire sociale contemporaine, EVS/RIVES
39. Abderrahmane Moussaoui, Professeur émérite, Lyon 2
40. Sebastien Abramson, Maitre de Conférences – Chimie – Sorbonne Université
41. Thierry DUMONT, Ingéneur de recherche (mathématiques) retraité
42. Marion Slitine, Anthropologue (Cesor/Ehess – Cne)
43. Bérénice GAGNE, ingénieure d’études SHS, EVS
44. Marjorie BURGHART, Chercheuse (Histoire médiévale), CNRS (Lyon)
45. Sophie Kern, DR, CNRS, 36
46. Sylvia Faure, Professeure de sociologie, Lyon 2
47. Nathalie Ortar, directrice de recherche, anthropologie, ENTPE
48. Céline CHABOT-CANET, MCF, musicologie, Université Lyon 2
49. Josette Debroux, MCF, sociologie, Lyon 2
50. Marie PLASSART, MCF, faculté des langues, Lyon 2