L’agression subie dans la rue par un enseignant d’une école juive portant kippa est un acte raciste grave, et il fait suite à une incontestable recrudescence d’actes violents sur des lieux et des personnes identifiés comme juifs.
Aujourd’hui, l’antisémitisme tue en France. Toutes les forces démocratiques et citoyennes doivent le prendre en compte.
Cependant, la réaction du Président de la République à l’événement nous plonge dans un abîme de perplexité. Il déclare,- enfin ! – que le port de la kippa dans la rue est un droit citoyen garanti par les lois sur la laïcité. Est-ce à dire que le Président a enfin compris que l’interdiction des signes religieux qui a été inscrite dans la loi, ce que tout le monde a compris comme visant les tenues musulmanes, était contraire à l’esprit des lois de 1905 sur la séparation des Églises et de l’État ?
Nous ne voulons pas croire que dans la situation de tension exacerbée qui existe dans notre pays le Président et le gouvernement vont continuer à accorder aux Juifs un statut spécial. Car non seulement ce serait contraire aux principes d’égalité devant la loi, mais ce serait un ferment supplémentaire pour le développement de l’antisémitisme !
Faut-il rappeler le nombre de femmes portant foulard agressées, au couteau, au cutter, à coups de poing sans que les ministres ne se déplacent ni s’indignent ? Comment ne pas être conscient à quel point cela peut être source de ressentiment ?
De même, sur un autre plan, quand les responsables des organisations sionistes ou le Premier Ministre ajoutent à la liste des actes antisémites trop réels et nombreux, la critique d’Israël et la défense des droits des Palestiniens – criminalisation de la campagne BDS, tentative d’interdire une exposition sur Gaza à la Maison des Métallos par exemple -, ne sont-ils pas conscients qu’ils favorisent ce racisme antisémite ?
Dans son rapport 2015, la commission nationale consultative des droits de l’homme résumait la situation ainsi : recrudescence des préjugés antisémites, montée de l’intolérance à l’égard des rites de l’islam, banalisation du racisme à l’égard des Roms tant biologisant que culturel, émergence d’une conception dévoyée de la laïcité et du principe de neutralité de l’État comme rempart à l’Islam, en ce que la laïcité n’est plus un outil d’apaisement mais un prétexte au rejet des différences.
Pour inverser ces tendances lourdes et dangereuses, il nous semble urgent de lutter avec tous nos concitoyens, quelle que soit leur religion ou leur absence de religion, pour que chacun puisse exercer dans l’espace public son droit à la libre expression de ses appartenances.
Le Bureau national de l’UJFP le 16-01-2016