Alerte : Israël prend des mesures alarmantes pour mettre en œuvre sa persécution des six organisations palestiniennes en Cisjordanie, la communauté internationale doit intervenir

8 novembre | Al-Haq  | Traduction SF pour l’AURDIP |en English

Al-Haq condamne fermement l’ordonnance militaire publiée par le commandant en chef du commandement central d’Israël consistant à transposer sa désignation illégale de Al-Haq comme « organisation terroriste » à l’intérieure de la Cisjordanie occupée. Des ordonnances militaires semblables ont été prises contre quatre organisations amies. L’ordonnance militaire constitue une mesure dangereuse et alarmante de mise à exécution de la désignation d’organisations palestiniennes (comme terroristes), qui place Al-Haq, les membres de son équipe et leurs biens en risque immédiat d’être attaqués, arrêtés et qu’il y ait des représailles. 

Le 19 octobre, dans une attaque d’une violence sans précédent contre des organisations de défense des droits humains de la société civile palestinienne, le ministre israélien de la défense, Benny Gantz, a pris une décision qui qualifie six organisations palestiniennes majeures, « d’organisations terroristes » à savoir, Addameer, l’association de soutien aux prisonniers et de défense des droits humains, Al-Haq pour le droit au service de l’homme, le Centre Bisan pour la recherche et le développement, Défense des enfants International-Palestine, l’Union des comités des travailleurs de l’agriculture et l’Union des comités de femmes palestiniennes. Cette décision a eu pour effet de criminaliser effectivement les organisations, les membres de leurs équipes et leur travail dans le cadre du droit intérieur d’Israël.

Le 1er novembre, le journal israélien Haaretz a rapporté que les six organisations palestiniennes sont restées légales en Cisjordanie occupée, en l’absence d’une ordonnance militaire les déclarant « associations interdites ». Selon l’article, les six organisations pouvaient continuer à fonctionner de plein droit en Cisjordanie occupée, à l’exception de Jérusalem où elles sont légalement enregistrées et citait des sources israéliennes confirmant que « le principal objectif en les labellisant organisations terroristes était de faire obstacle à leur collecte de fonds ».

Pour autant, la loi a pris effet directement et immédiatement sur le personnel et sur les biens des organisations désignées à Jérusalem Est annexée et occupée illégalement.

Le 3 novembre, cependant, le commandant militaire israélien a signé une ordonnance militaire qui met hors la loi les six organisations palestiniennes de la société civile dans le reste de la Cisjordanie également. L’ordonnance militaire déclare que « chaque membre de l’institution « Institution Al-Haq » ou « Al-Haq », incorporé/associé ou non, travaillant sur internet ou d’une autre manière, et tout groupe, cellule ou faction, institution, branche centrale ou partie de branche, et quelle que soit son appellation, incluant tout membre ou personne appartenant à ce courant, connue sous différents noms, est une organisation illégale au sens des règles de la défense ».

L’ordonnance militaire est fondée sur l’Article 84 des règles de la défense (urgence) de 1945  du Mandat britannique, qui ont été abrogées peu avant la fin du Mandat. Ainsi que la Grande Bretagne l’a catégoriquement déclaré, « la Règle 119 avait déjà été abrogée par le Décret-en-Conseil pour la Palestine (Révocation) de 1948 et, en tant que tel, ne -s’applique plus.1

Lorsqu’Israël a occupé la Cisjordanie en 1967, le commandant militaire israélien a publié  l’Ordonnance Militaire No.101 mettant hors-la-loi toute forme d’assemblée pacifique, dont le soutien à des organisations désignées « associations illicites, rétablissant l’article 84 précédemment abrogé des règles de 1945 pour la défense (l’urgence). En vertu de l’article 84 (1) (a)-(b), le commandant militaire s’est assuré de pouvoirs considérables pour mener à bien des démolitions de propriétés, des mesures de censure, la répression de manifestations, des fermetures, des couvre-feux, des détentions administratives et des déportations. De plus, l’Article 251 de l’ordonnance militaire N° 1651 promulguée en 2010, rend tout soutien individuel à de telles organisations, passible d’une peine de prison de dix ans. Les organes autorisés des traités des Nations Unies ont mainte fois réitéré que de telles mesures sont prises en violation des garanties fondamentales humanitaires de la Quatrième Convention de Genève et des traités internationaux sur les droits humains.2

En prenant ces ordonnances militaires, l’armée israélienne empiète profondément sur le cœur et sur le fonctionnement de la société civile palestinienne, en une violation flagrante de l’Article 43 du règlement de La Haye (1907). Comme l’a déclaré le Haut Représentant de l’UE, Joseph Borrell, « les organisations de la société civile sont une force dans la promotion du droit international, des droits humains et des valeurs démocratiques dans le monde et en Palestine ». Elles sont ainsi partie intégrante du fonctionnement correct d’un État démocratique. En ciblant les six organisations de premier plan et actives de longue date dans la société civile palestinienne, en Cisjordanie occupée, en Israël, Israël tente de fait de réorganiser les institutions du territoire occupé, en violation de l’Article 47 de la Quatrième Convention de Genève , tout en menant une attaque directe sur les droits des personnes sous protection, en violation de leurs droits humains selon l’Article 27 de la Quatrième Convention de Genève à laquelle ils ont droit « en toutes circonstances ».

S’ajoute à cela l’intimidation et des attaques dégradantes visant à isoler les organisations de la société civile palestinienne de leurs partenaires et alliés dans la défense des droits humains. Israël poursuit sans honte sa stratégie de rétrécissement de l’espace de la société civile palestinienne pour faire taire ses voix dissidentes et démanteler les piliers de la démocratie. Les campagnes répétées de persécution de la part d’Israël visent à normaliser progressivement ses actes inhumains de persécution et d’apartheid envers les défenseurs des droits humains des Palestiniens ; par le harcèlement systématique et les campagnes de diffamation de Al-Haq et de menaces de mort contre ses équipes.

Israël applique maintenant de façon préoccupante ses menaces en complète impunité et mépris total des vigoureuses condamnations émanant de la communauté internationale ces deux dernières semaines, dont les organes autorisés des traités des Nations Unies, la Haut Commissaire pour les Droits de l’Homme, des représentants officiels de l’UE ainsi que des individus et groupes de défense des droits humains dans la société civile.

En lançant cette alerte, Al-Haq exprime sa profonde préoccupation concernant la sûreté et la sécurité des membres de son équipe travaillant en Cisjordanie, y compris Jérusalem Est. Alors qu’Israël met en place son arsenal juridique et se prépare à prendre des mesures concrètes de répression de l’action de Al-Haq, les condamnations verbales sont plus que jamais insuffisantes.

Au vu de ce qui précède, Al-Haq exhorte la communauté internationale à des actes concrets tels que :

  • En appeler à Israël pour un retrait de ces désignations en tant qu’actes qui violent la liberté d’opinion et d’expression, la liberté d’association et s’apparentent à des actes d’apartheid sujets à poursuites en vertu de l’Article 7 (2)(h) du Statut de Rome ;
  • Publier une note à envoyer aux banques et aux institutions financières les mettant en demeure de rejeter comme inapplicable la désignation par Israël des six organisations palestiniennes comme « terroristes » et « illégales ».
  •  Communiquer directement avec l’Union Européenne et les États tiers et leur recommander de retirer les clauses de « terrorisme » conditionnant le financement par des donateurs, des organisations de la société » civile dans le territoire occupé palestinien ;
  • Prendre unilatéralement ou collectivement des sanctions visant l’ensemble du commerce avec Israël, assurer qu’Israël se conforme au droit international et empêcher d’autres suppressions de la présence palestinienne dans le territoire occupé. Un accent particulier devrait être mis sur le besoin de mettre fin à la vente et à la fourniture de biens militaires à Israël ;
  • Mettre en œuvre des lois interdisant l’importation de marchandises produites dans les colonies illégales situées dans le territoire occupé, avec une référence spéciale au rapport de l’ONU de 2020 sur les entreprises impliquées dans certaines activités liées aux colonies sur le Territoire Palestinien Occupé ;
  • Prendre des mesures concrètes et immédiates pour mettre fin à l’occupation prolongée du territoire palestinien occupé par Israël et mettre fin au régime d’apartheid qui frappe le peuple palestinien dans son ensemble depuis 1948, en assurant la possibilité de recours et des réparations pour tous les Palestiniens, dont le droit à l’autodétermination et le droit au retour en Palestine des réfugiés et des exilés dans la diaspora.

Note-s
  1. S. Darcy, ‘Punitive House Demolitions, the Prohibition of Collective Punishment, and the Supreme Court of Israel’ 21 Penn State International Law Review (2002-2003) 477, 481.[]
  2. CCPR/C/ISR/4 (21 November 2014), United Nations Human Rights Committee Reviewing Fourth Periodic Report of Israel accessed 24 October 2015.[]
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