A PROPOS DE LA PLAINTE DE LA LDH CONTRE DEUX MILITANTS MONTPELLIERAINS

Ce texte a été écrit quand nous avons su qu’une plainte était déposée contre Saadia et Husein. En le publiant, nous espérons toujours que le bon sens l’emportera et que la LDH retirera sa plainte.

L’UJFP, une des principales associations du judaïsme laïc français organisé, est par nature même extrêmement sensible au racisme sous toutes ses formes, et notamment dans son versant antisémite. Elle cherche de par son action à défaire les amalgames, à les déconstruire, plutôt qu’à les encourager. Pour nous, juif n’égale pas sioniste et antisionisme n’égale pas antisémitisme même si certains cumulent tranquillement.

Nous considérons donc avec attention et précaution le genre d’affaire qui met en jeu ce type d’amalgame surtout pris dans un contexte qui instrumentalise l’antisémitisme pour de funestes causes, comme celle du soutien inconditionnel à la politique d’Israël ou de la désignation des musulmans comme coupables de racisme voire de terrorisme dès lors qu’il s’agit de critiquer Israël.

En ce sens le fait que deux militants de BDS 34 aient pu partager, l’été dernier pendant l’offensive meurtrière sur Gaza, un post sur leur page facebook sans avoir la vigilance nécessaire pour vérifier le texte violemment antisémite associé à une photo faisant elle-même un rapprochement pour le moins fort discutable entre sionisme et nazisme, est un acte grave, à ne pas minimiser.

Dès qu’ils ont été alertés par d’autres militants avertis par la LDH locale, et qu’ils ont compris ce qu’ils avaient partagé, ils se sont excusés et ont immédiatement retiré ce post qu’ils trouvaient détestable de leur facebook. Qu’ils n’aient pas communiqué publiquement et clairement sur leur erreur en était une autre.

Le contexte du moment ne peut servir d’excuse, mais la raison peut entendre une explication. Les réseaux sociaux étaient envahis cet été de textes et d’images de toute nature sur la tragédie que vivait la population gazaouie, faire suivre rapidement une image sans vérifier le texte complet qui l’accompagne, en général seules les trois premières lignes sont visibles, pouvait se produire sans être la marque d’une adhésion à des thèses nazies qu’on n’avait pas lues. Les militants de BDS comme tous ceux du mouvement de solidarité étaient alors accaparés à l’organisation des manifestations quotidiennes pour la solidarité avec Gaza en opposition avec le gouvernement français, et la lutte pour que le massacre s’arrête. Ils ont sans doute pensé que leur bonne foi, leur éloignement personnel de tout racisme, et le retrait immédiat du FB suffisaient. Malheureusement dans les périodes empoisonnées comme celles que nous vivons cela ne suffit pas.

A partir de là commence une autre histoire, qui ressemble elle aussi, encore, à une instrumentalisation. Un autre élément de contexte très local doit ici être apporté, qui ne se trouve pas sur FB lui, c’est celui de la guerre locale menée par certains représentants associatifs contre BDS 34 et bien au-delà pour délégitimer la campagne BDS France. Guerre de pouvoir local mais guerre politique aussi contre une campagne de dimension internationale, la seule qui soit parvenue à inquiéter réellement le régime israélien depuis 2000. Faut-il rappeler que la campagne BDS répond à un appel de toute la société civile palestinienne, syndicats et partis politiques inclus, pour lutter contre le régime d’apartheid subi par le peuple palestinien ? Faut-il rappeler que la Charte de la campagne BDS France exclut clairement et catégoriquement tout racisme et tout boycott visant des personnes en raison de leur appartenance religieuse ou de leur nationalité ? Le BDS vise les institutions d’un régime, et cela jusqu’à ce que ce régime cesse. Exactement comme en Afrique du Sud, c’était le régime d’Apartheid qui était boycotté jusqu’à ce qu’il cesse.
Que la LDH locale n’ait jamais accepté de rencontrer les deux incriminés, ni de discuter avec la campagne BDS 34, qu’elle n’ait jamais demandé ou proposé une communication publique sur cette erreur, qu’elle ait campé sur une seule et catégorique exigence, l’exclusion immédiate et inconditionnelle des deux militants sinon elle attaquait en justice, qu’elle se soit portée partie civile contre eux, refusant de prendre acte du retrait immédiat, des nombreux témoignages des militants de diverses associations membres, relève nous semble-t-il d’un acharnement qui vise bien au-delà des faits et des personnes. Nous espérons à ce propos que bien entendu la LDH a déposé une plainte contre x contre les véritables auteurs du texte antisémite publié, et le site source. Mais elle semble avoir choisi de ne pas communiquer à ce sujet.

Qu’aujourd’hui une autre section locale de la LDH puisse mettre en circulation un montage répugnant, issu d’un site sioniste «cool Israël», qu’ils indiquent avoir été publié sur le site de BDS 34, mais sans doute ont-ils eux aussi omis de vérifier leurs sources, nous conforte dans la pénible sensation qu’aucune bienveillance n’a présidé à l’approche de militants pour une cause en principe commune, qu’aucune prise en compte des dangers qu’un tel acharnement fait peser sur un outil précieux de la solidarité avec la Palestine. Nous ne pouvons en effet imaginer que ce puisse être le but recherché par la LDH. Que les deux responsables du post aient depuis communiqué très clairement sur leur erreur ne suffit d’ailleurs toujours pas.[note]<*>DECLARATION DE SAADIA BEN FAKHA ET HUSEIN ABUZAID (diffusée à la presse le 19 mars)
Jusqu’au mercredi 18 mars après-midi nous ignorions – officiellement – que c’était la LDH Montpellier qui avait porté plainte contre Saadia. D’autant qu’au départ nous étions deux personnes visées par Sophie Mazas, la présidente de la LDH Montpellier : Saadia Ben Fakha, porte-parole du comité BDS France34 et Husein Abuzaid, également porte-parole du même comité et président de l’association des Palestiniens du Languedoc-Roussillon.
Le 6 août vers 20h nous avons été successivement contactés au téléphone par un ami commun, suite à un appel téléphonique de la présidente de la LDH Montpellier, qui l’a informé de la présence sur notre page FB à l’endroit d’une photo (ci-dessous) d’un texte totalement inadmissible.
Nous avions effectivement partagé la photo ci-dessous qui est discutable mais n’a rien d’antisémite. Rappelons si besoin que les célèbres journalistes israéliens M. Warschawski et G. Levy (Haaretz) ont caractérisé de « fasciste » le gouvernement Netanyahou cet été.
Cette photo n’était accompagnée d’aucun commentaire visible et nous l’avons l’un et l’autre partagée sans cliquer sur la photo. Ce manque de vigilance est la seule « faute » que nous avons commise, bien involontairement.
Quelle n’a pas été notre (mauvaise) surprise quand nous avons cliqué sur la photo et découvert le texte qui lui était attaché :
« Les nazis et les sionistes sont deux revers de la même médaille, ce que fait le sionisme l’a déjà fait le Nazisme au millimètre près ; c’est la même école » « Ce que faisait Hitler aux juifs était fait exprès pour que le monde sympathise avec eux et leur donne tous les droits, jusqu’aujourd’hui ils nous sortent cette histoire d’Hitler (Shoa) ils ont tout eu à cause d’Hitler » « Ce que faisait Hitler aux juifs était voulu et prémédité pour un but bien précis, une tactique propre aux juifs comme le grand mensonge du 11 septembre et bien d’autres…
Ils ont sacrifiés quelques juifs pour avoir tout ce qu’ils ont aujourd’hui, Hitler a participé à la colonisation de la Palestine, il faisait partie du plan » « La relation d’Hitler avec la famille Rotchild cette famille juive et satanique qui possède toutes les terres de la Palestine et qui est l’une des plus puissantes familles au monde ».
L’un et l’autre avons évidemment trouvé ce texte complotiste, antisémite, négationniste et totalement ahurissant.

Nous avons immédiatement effacé de notre mur la photo et le texte qui lui était attaché. Il ne s’est pas écoulé 15mn entre le moment où nous avons découvert ce texte et sa destruction. C’est dire combien nous sommes à mille lieux des idées qui y étaient exprimées.
Ces explications ont été fournies sur les listes BDS et à la quinzaine d’associations, partis et syndicats partenaires du comité BDS France 34. Elles ont été communiquées oralement par plusieurs personnes à la présidente de la LDH qui a pu constater par elle-même la disparition immédiate de la photo et du texte.
C’est la raison pour laquelle nous ne comprenons pas aujourd’hui l’acharnement à vouloir faire juger et condamner l’une de nous deux : Saadia Ben Fakha, en hypertrophiant un accident involontaire. Le comité BDSFrance34 existe depuis 6 ans. Il a joué un rôle déterminant dans la lutte victorieuse de la Coalition contre Agrexco, il continue à avoir une activité intense et un parcours « sans faute ». Husein en est membre depuis sa création et Saadia depuis 2012.
Nous allons expliquer cela à la police et leur remettre une vingtaine de témoignages, dont ceux de juifs, de l’Union Juive Française pour la Paix (UJFP) y compris celui de leur Co-président, qui attestent que les accusations gravissimes portées contre nous sont totalement infondées.

https://www.bdsfrance.org/declaration-de-saadia-ben-fakha-et-husein-abuzaid-du-comite-bds-34/

Aujourd’hui la LICRA s’associe à la plainte de la LDH dans les termes les plus odieux. Ceci achève de nous convaincre que s’il devait se tenir il s’agirait d’un mauvais procès, dans un combat douteux.

Notre section locale milite activement depuis des années dans la campagne BDS et notamment avec les deux militants accusés de façon ignominieuse, des représentants nationaux de l’UJFP ont milité avec eux, tous reconnaissent le sérieux et la rigueur de leur engagement, nous les soutiendrons et ne les laisserons pas seuls. Reste à espérer que la LDH nationale accepte d’envisager l’ensemble de ce contexte, et entame un dialogue constructif avec des militants, certes capables comme nous tous de faire une erreur, mais de bonne foi, et qui luttent eux aussi depuis des années avec toute leur énergie pour plus de justice et plus de droit.

Le Bureau national de l’UJFP, le 7 avril 2015

Post-scriptum :
Nous avons demandé à rencontrer le Président de la LDH à ce propos et au sujet d’autres affaires en cours il y a deux semaines. A ce jour le secrétariat de la LDH nous en a confirmé au téléphone la réception mais n’est pas en mesure de nous dire si la rencontre pourra avoir lieu.
Par ailleurs nous publions le communiqué du 6 avril cosigné par BDS France 34 et d’autres organisations.