La bande de Gaza traverse aujourd’hui l’une des phases les plus violentes depuis le début de la guerre. Les zones orientales et centrales de la ville de Gaza, en particulier les quartiers de Zaytoun et de Sabra, subissent des bombardements continus et une campagne de destruction systématique d’une ampleur inégalée depuis des décennies. Ces quartiers, autrefois considérés comme le cœur battant de Gaza et sa porte sud-est, sont devenus aujourd’hui le théâtre de l’une des atrocités les plus graves commises aux yeux du monde, dans un silence international et alors que l’attention politique et médiatique est détournée vers d’autres événements.
Depuis plusieurs jours, l’occupation a intensifié ses frappes contre ces zones, utilisant toutes les formes de puissance militaire : avions de combat, artillerie lourde, drones armés, et allant jusqu’à employer de nouvelles techniques, comme des robots piégés envoyés pour faire exploser les maisons après avoir forcé leurs habitants à fuir sous la menace des armes. Il ne s’agit pas d’une simple escalade militaire classique, mais d’une opération méthodique avec des objectifs clairs : déraciner les habitants, vider les quartiers de leur population, puis les raser entièrement.
Quartier de Zaytoun : un symbole de résistance sous le feu
Zaytoun est l’un des plus grands quartiers de Gaza, parmi les plus densément peuplés, abritant des dizaines de milliers d’habitants. Ce quartier, connu comme la porte sud-est de Gaza, s’est transformé en quelques heures et jours récents en un amas de décombres. Les maisons qui avaient abrité des générations sont détruites, les mosquées qui représentaient des centres de spiritualité et de sérénité ne sont plus que ruines, et les écoles qui accueillaient des milliers d’élèves se sont effondrées sur leurs mobiliers.
Selon les estimations des organisations de défense des droits humains, plus de 400 maisons ont été totalement détruites en seulement deux jours, et près de 90 000 personnes ont été contraintes au déplacement forcé sous l’effet des bombardements massifs. Une scène qui rappelle la Nakba de 1948, mais cette fois-ci diffusée en direct, sous les yeux d’un monde indifférent.
Quartier de Sabra : le voisin plongé dans la catastrophe
Le quartier de Sabra n’a pas été épargné. Les flammes de l’occupation se sont étendues à ce secteur voisin, qui fait partie intégrante du centre de Gaza. Les bombardements intenses ont contraint des milliers de familles à quitter leurs foyers, se dirigeant vers l’ouest, vers des zones supposées plus sûres, ou vers le sud, au centre de la bande. Mais il n’existe plus aucun endroit sécurisé : la destruction poursuit les habitants partout où ils vont, et l’exode est devenu sans destination précise.
Scènes sur le terrain
Ce qui se déroule aujourd’hui à l’est et au centre de Gaza ne peut être qualifié que de génocide planifié :
- Les corps gisent dans les rues, sans que les secouristes puissent y accéder à cause de l’intensité des bombardements.
- La Défense civile a annoncé qu’elle n’était plus en mesure de répondre aux appels à l’aide, en raison de l’effondrement quasi total des infrastructures et des ressources.
- Les habitants fuient à pied, portant le peu d’affaires qu’ils ont pu sauver, suivis par des drones qui tirent de façon aléatoire pour les terroriser et les empêcher de revenir.
- Les enfants sont les victimes les plus vulnérables : leurs cris et leur quête désespérée d’un abri au milieu des ruines sont devenus une scène quotidienne dans la Gaza assiégée.
La technologie au service de la destruction
L’occupation n’a pas seulement recours aux frappes traditionnelles, mais elle introduit également de nouvelles méthodes technologiques dans la bataille. Des robots piégés sont envoyés dans les maisons après leur évacuation pour les faire exploser une à une, tandis que de petits drones de type « quadcopter » encerclent les blocs résidentiels et tirent directement sur les civils. Cet usage démontre que l’objectif n’est pas de cibler des combattants ou des sites militaires, mais bien de mettre en œuvre un plan global visant à anéantir le quartier et à en vider ses habitants.
Les conséquences humanitaires catastrophiques
Le déplacement forcé qui frappe Zaytoun et Sabra n’est qu’une partie d’un plan plus large visant l’ensemble de la ville de Gaza. Les déplacés n’ont trouvé aucun refuge sûr : les centres d’accueil sont saturés à l’extrême et les zones occidentales et méridionales de la ville sont incapables d’absorber davantage de réfugiés. Ce qui se passe n’est donc pas une simple « bataille », mais un déplacement massif qui vise à reproduire une nouvelle Nakba au XXIe siècle.
Le silence du monde et la complicité internationale
Ces crimes se déroulent dans un contexte politique sensible, alors que le monde est absorbé par des dossiers internationaux comme le sommet d’Alaska entre les États-Unis et la Russie. Israël exploite cette distraction pour mettre en œuvre son plan à Gaza, sans véritable couverture médiatique ni pression politique significative. Ce « timing calculé » révèle une politique délibérée visant à détourner l’attention internationale, pendant que « le plan final » est exécuté sur le terrain.
La dimension coloniale en Cisjordanie
Parallèlement à ce qui se passe à Gaza, le gouvernement de l’occupation avance rapidement dans l’approbation d’un vaste projet colonial visant à construire 3 412 unités de logement entre Jérusalem-Est et la colonie de Ma’ale Adumim. Ce projet signifie la séparation de Jérusalem-Est de la Cisjordanie, annihilant ainsi toute possibilité d’un État palestinien avec continuité territoriale. Ce ne sont plus des plans secrets : des ministres israéliens ont déclaré publiquement qu’« il n’y a pas d’État palestinien et qu’il ne sera jamais permis d’en établir un ».
Gaza au bord de l’effacement
Ce qui se déroule aujourd’hui dans les quartiers de Zaytoun et de Sabra n’est pas une simple opération militaire, mais bien l’ouverture d’une nouvelle phase d’extermination et de nettoyage ethnique. Gaza, qui a résisté pendant des années au siège et aux guerres, affronte aujourd’hui le risque d’une disparition totale de la carte. Les maisons sont rasées, les habitants déplacés sous les bombes, et des quartiers entiers sont effacés de l’existence. Ce n’est pas une guerre contre des combattants, mais une guerre contre l’existence humaine elle-même.
Gaza ne redoute pas l’avenir, elle vit déjà la catastrophe à chaque instant, dans une bataille existentielle dont l’issue sera soit la survie, soit l’anéantissement. Ce qui se passe à Zaytoun et à Sabra n’est pas la fin, mais le début d’une phase encore plus dangereuse, qui pourrait engloutir toute la bande de Gaza si le monde ne se mobilise pas avant qu’il ne soit trop tard.
(Voir aussi les chroniques et articles postés par Brigitte Challande du Collectif Gaza Urgence déplacé.e.s quotidiennes sur le site d’ISM France et du Poing, article hebdomadaire sur le site d’Altermidi, et sur l’Instagram du comité Palestine des étudiants de Montpellier..)