L’AG de l’ONU avait proclamé 2014 l’année de la Palestine.
Quelle année en effet pour les Palestiniens !
Sur le terrain, « Tsahal », l’armée qui possède un État, a continué à pousser ses pions :
– poursuite de la réduction de la place des Palestiniens en Cisjordanie comme peau de chagrin, avec son cortège de morts et d’arrestations
– judaïsation violente de Jérusalem-Est annexé, avec de plus expulsion « administrative » et sans motivation de jeunes Palestiniens de la ville; provocations sur l’Esplanade des Mosquées, tentative grossière mais dangereuse au plan mondial pour transformer le conflit colonial en conflit religieux
– judaïsation du Naqab/Néguev par concentration des Bédouins palestiniens dans des villes dortoirs et destruction de leurs villages, et poursuite de la colonisation de la vallée du Jourdain
– manifestations racistes contre les Palestiniens comme contre les immigrés, et menaces sur les manifestations pacifistes
– Gaza, bien sûr, Gaza sous blocus, Gaza victime d’un déluge de fer et de feu pour punir les Palestiniens d’avoir obligé toutes les factions à constituer un gouvernement d’unité nationale. Plus de 2200 morts, plus de 11000 blessés, des dizaines de milliers de Gazaouis encore sans-abri à l’entrée de l’hiver…
Sur le plan juridique et parlementaire, poursuite de l’escalade dans les discriminations proposées par l’extrême droite du Likoud et ses alliés d’extrême extrême droite : interdiction de la commémoration de la Nakba, projet d’État national du peuple juif, interdiction d’appeler à la campagne BDS,.. Cet été, comme le tribunal Russell l’a montré, outre la recension des crimes de guerre et crimes contre l’humanité, c’est de bien des secteurs de l’opinion, y compris des responsables politiques et religieux, que sont partis de véritables incitations au génocide !
Sur le plan diplomatique, « l’incapacité » de John Kerry à influer sur le gouvernement Nétanyahou a été manifeste, les lobbys sionistes, juifs comme évangélistes, interdisant au gouvernement US toute mesure de rétorsion, obtenant même du Congrès unanime le maintien d’un soutien militaire indéfectible, les USA réapprovisionnant Israël en munitions dès après l’opération « Bordure protectrice ». Le Président Hollande a été probablement cette année le chef d’Etat allant le plus loin dans l’affirmation de la solidarité occidentale à Israël, s’excusant de ne pas lui exprimer son amour en chantant, et affirmant en plein carnage le droit d’Israël à se défendre ! Quant à l’Union européenne, même si elle a agacé le gouvernement israélien par ses mesurettes sur l’étiquetage ou le blocage théorique des produits des colonies, elle a maintenu l’essentiel de l’accord d’association, au mépris de l’article 2 qui prévoit pourtant une suspension de l’accord en cas de non-respect des droits humains par Israël. L’opération « bordure protectrice » n’a même pas donné lieu à enquête internationale.
Un concentré de cette lâcheté de l’autoproclamée communauté internationale, en fait de sa solidarité sans faille avec son allié, nous est donnée par l’absence quasi complète de réactions devant la mort d’un ministre palestinien directement consécutive aux coups reçus des soldats de l’armée d’occupation, pour avoir osé manifester de façon non violente contre une nouvelle implantation coloniale, illégale même du point de vue israélien !
Quelles peuvent être alors les quelques lueurs d’espoir ?
D’abord, et avant tout, l’extraordinaire résistance du peuple palestinien, résistance armée légitime à Gaza, résistance le plus souvent non armée des comités populaires contre la construction du Mur ou contre des checkpoints, grèves de la faim des prisonniers à l’isolement, résistance à l’étouffement à Jérusalem,…
Ensuite, s’il y a bien un processus de fascisation en Israël, il est loin d’être achevé. Non seulement Nétanyahou a été conduit à convoquer de nouvelles élections, mais il se trouve encore des jeunes pour refuser de participer à une armée criminelle, des journalistes courageux pour dénoncer l’aggravation du régime d’apartheid, d’anciens membres des « services secrets » pour dire tout haut qu’Israël fonce dans le mur…
Enfin, si la plupart des dirigeants de la « communauté internationale » se déshonorent dans le soutien à cet État voyou, les sociétés civiles, elles, multiplient les preuves de leur écœurement devant ces comportements honteux. Malgré le honteux maintien de la circulaire Alliot-Marie en France et la poursuite de la tentative de criminaliser les actions, malgré la tentative lamentable soutenue par Valls et Hollande d’accrocher à nos actions l’infamante accusation d’antisémitisme, la campagne BDS se développe en France comme elle s’étend à l’étranger, les actions de Boycott économique, culturel, universitaire, sportif, se multiplient. Et cette campagne obtient des succès, même si les Sanctions tardent à venir, le Désinvestissement est à l’ordre du jour ; les adhésions mondiales d’associations syndicales à BDS se développent, les ventes des produits des colonies baissent, des chefs d’entreprises s’inquiètent, Sodastream doit déménager de Cisjordanie, des cargos de marchandises israéliennes sont arrêtés aux Etats-Unis, Veolia complice d’Israël perd de gros marchés…
Cet été, il y a eu des manifestations dans le monde entier, plus de 500 manifestations en France contre l’agression israélienne sur Gaza, souvent dans des villes qui n’en avaient pas connues pendant l’opération « plomb durci ». Une nouvelle génération s’est levée pour marquer sa solidarité.
La reconnaissance de l’État de Palestine par les deux tiers des États du monde, qui s’est étendue à plusieurs États européens cette année, est le signe encourageant que la mobilisation des peuples peut parvenir à faire bouger un tant soit peu des dirigeants aussi rétifs soient-ils.
L’Union Juive Française pour la Paix salue le peuple palestinien et sa résistance. En 2014, elle a gagné en visibilité et s’est renforcée, car parmi les Juifs de France eux-mêmes l’exaspération devant la politique israélienne et devant la prétention du CRIF à les engager en soutien a grandi. Elle appelle à une particulière vigilance dans les semaines qui viennent, car les surenchères sont à craindre dans la période électorale qui s’ouvre. Elle s’engage, et engage tous ses adhérents à développer encore plus et mieux la solidarité sous toutes ses formes, en développant et approfondissant les cadres unitaires, notamment celui de la campagne Boycott, Désinvestissement, Sanctions.
Le Bureau national de l’UJFP le 21-12-2014