Par Saïd Bouamama. Publié le 10 février 2019 sur son blog.
Article initialement publié dans le numéro 19 de la revue « Les possibles » de l’association ATTAC du 9 février 2019.
Après de nombreuses décennies de négation, la question des discriminations racistes [[La nomination de notre objet est lui-même sujet à controverse. Certains parleront de « discriminations raciales », d’autres de « discriminations en fonction de l’origine », d’autres encore de « discriminations ethniques » et d’autres enfin de « discriminations racistes ». Nous choisissons cette dernière expression en raison du focus qu’elle met sur le résultat et/ou la production des discriminations. De même que les discriminations sexistes produisent socialement des rapports sociaux sexistes, les discriminations racistes produisent des rapports sociaux racistes.]] est depuis près de deux décennies l’objet de nombreuses publications, théorisations et recherches [[Sans être exhaustif les ouvrages suivants peuvent être conseillés : Véronique de Rudder-Paurd, Christian Poiret, François Vourc’h, L’inégalité raciste : l’universalité républicaine à l’épreuve, PUF, Paris, 2015 ; Sophie Body-Gendrot, Catherine Wihtol de Wenden, Police et discriminations raciales, le tabou français, Editions de l’atelier, Paris, 2003 ; Cris Beauchemin, Christelle Hamel, Patrick Simon, Trajectoires et origines : Enquête sur la diversité des populations en France, INED, Paris, 2015 ; Pierre Tévanian, Le racisme républicain ; réflexions sur le modèle français de discrimination, Esprit frappeur, Paris, 2002 ; Saïd Bouamama, Les discriminations racistes : une arme de division massive, L’Harmattan, Paris, 2010 ; etc.]]. Quelques constats et conclusions récurrents ressortent de ce progrès récent du savoir et de la recherche : les discriminations racistes existent, elles sont massives et systémiques, elles ont un impact particulièrement destructif pour les sujets qui les subissent, et elles ne se limitent plus aux « étrangers » ou « immigrés », mais s’étendent désormais à des citoyens de nationalité française, caractérisés par certains marqueurs « identitaires » (nom, couleur, religion, etc.). Après avoir apporté quelques précisions conceptuelles, nous nous pencherons sur l’ampleur du phénomène, son inscription dans l’histoire, sa fonction sociale et économique et enfin ses effets sur les victimes, mais aussi sur l’ensemble de notre société.