Deux assignations en justice visent l’organisateur du salon du Bourget

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Paris, 23 mai 2025 

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Du 16 au 22 juin 2025, le parc des expositions du Bourget (93) accueillera l’un des plus grand salon mondiaux de l’aéronautique et de l’espace civil et militaire. 2500 exposants, industriels et start-up venus de 48 pays viennent présenter leurs derniers produits (missiles, drones, bombardiers…) pour signer des contrats avec des États du monde entier. 

D’après les informations publiées sur le site internet de la société SIAE, organisatrice du salon, huit entreprises d’armement israéliennes exposeraient leurs produits et leurs activités lors de l’événement. Il ne devrait pourtant exister aucun doute quant au soutien que ces entreprises apporteraient à l’effort de guerre mené par Israël dans les territoires palestiniens occupés (TPO), au vu des éléments accessibles sur leurs sites ou réseaux officiels. Certaines iraient même jusqu’à promouvoir leurs armements comme ayant été « testés au combat » à Gaza. Le SIBAT, Direction de la coopération internationale du ministère israélien de la Défense, figure également sur la liste officielle des exposants. 

De plus, plusieurs entreprises d’armement, d’autres nationalités, qui continueraient à fournir directement ou indirectement du matériel militaire à des entreprises, délégations ou intermédiaires israéliens, seraient, elles aussi annoncées parmi les exposants. 

Une assignation en justice a donc été envoyée au tribunal judiciaire de Bobigny pour une procédure de référé, portée par les associations Al-Haq, Union juive française pour la paix (UJFP), Attac-France, Stop Fuelling War (SFW) et Survie, reprochant à la SIAE d’accueillir ces entités alors que la Cour Internationale de Justice (CIJ) a affirmé et rappelé à plusieurs reprises la plausibilité du génocide à Gaza et que la Cour Pénale Internationale (CPI) a émis des mandats d’arrêts pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité à l’encontre du Premier Ministre israélien Benjamin Netanyahu et de l’ancien ministre israélien de la défense Yoav Gallant. Les crimes visés comprennent le meurtre et le recours à la famine comme arme de guerre.

En dépit d’une insécurité alimentaire aiguë,1 et des appels répétés émanant de nombreuses instances internationales exhortant Israël à mettre un terme à la commission des crimes les plus graves, le nombre de civils tués augmente encore chaque jour en Palestine. L’armée israélienne a déclaré ce dimanche 18 mai le lancement de l’opération « Chariots de Gédéon » dont le but affiché est d’ « attaquer Gaza de toutes ses forces » (B. Netanyahou).

On compte aujourd’hui plus de 52 000 morts selon l’ONU dont au moins la moitié de femmes et d’enfants, et plus de 118 000 blessé·e·s à Gaza et en Cisjordanie. Gaza compte le plus grand nombre d’enfants amputés par habitant au monde2. L’acheminement de l’aide humanitaire est rendu chaque jour plus difficile -et ce alors que dès mars 2024, les Nations Unies estimaient déjà que « 100 % de la population de Gaza [était] dans une situation d’insécurité alimentaire grave (ou de famine). Ces éléments ne font que renforcer la conclusion de la CIJ portant sur la plausibilité du génocide3 à Gaza.

Par ailleurs, une seconde assignation distincte portée par Attac-France, Survie et Stop fuelling War a été envoyée conjointement au même tribunal. Les associations plaignantes reprochent au SIAE la promotion et la participation au salon d’entreprises qui alimenteraient indirectement les conflits en Ukraine et au Soudan, à travers la livraison d’armes à des entreprises de pays tiers, tels que les Émirats Arabes Unis.

Depuis l’invasion russe du 24 février 2022, la guerre continue de faire rage en Ukraine, faisant plus de 40 000 victimes civiles dans le pays : 12 000 tués et 29 000 blessés. La CPI a ouvert une enquête sur les crimes commis en Ukraine dès mars 2022 et a depuis émis 6 mandats d’arrêt dont un contre le président russe Vladimir Poutine pour les crimes de guerre de déportation et transfert illégal de population.

Enfin depuis avril 2023, le Soudan est plongé dans une guerre civile dévastatrice opposant l’armée régulière aux milices paramilitaires des Forces de Soutien Rapide (FSR), reconnues par la communauté internationale comme étant responsables de graves crimes internationaux, incluant pillages, exécutions et violences sexuelles, particulièrement dans la région du Darfour où un risque réel de génocide a été identifié contre la communauté Masalit. Ce conflit a causé plus de 150 000 morts et déplacé près de 13 millions de personnes tandis que la moitié des 44 millions de Soudanais sont aujourd’hui menacés par la famine.

Par ces deux assignations, il est demandé à la société SIAE de prendre toutes les mesures en son pouvoir pour faire cesser un « trouble manifestement illicite » et de prévenir un risque de « dommages imminents », dans la mesure où le salon pourrait servir de plate-forme commerciale renforçant le pouvoir économiques d’entreprises, délégations ou intermédiaires susceptibles de participer directement ou indirectement à la perpétuation des crimes internationaux en question. 

Sans les armes et composants provenant de multinationales du monde entier, ces crimes ne pourraient être perpétrés avec une telle intensité. Ce commerce s’apprête à avoir lieu sur notre sol, à quelques kilomètres de Paris. 

Tout en dénonçant l’inaction persistante des autorités françaises face au risque sérieux de génocide à Gaza, ainsi que celle de la communauté internationale, qui n’a toujours pas adopté de sanctions économiques à l’encontre d’Israël — alors qu’elle a su le faire dans les cas de la Russie et du Soudan —, ces assignations rappellent avec insistance la nécessité de ne pas occulter la responsabilité des acteurs privés dans le soutien parfois même indirect à la commission de crimes internationaux graves , prévus et sanctionnés par notre Code Pénal.

Les deux assignations ont été rédigées avec la coordination, l’aide juridique et stratégique de la coalition Droit et mouvements sociaux, et grâce aux recherches de membres des collectifs en soutien. Elles s’inscrivent dans un contexte de mobilisation sociale croissante contre les politiques de militarisation de la France et de l’Europe, contre l’impunité d’acteurs qui tirent profit de la guerre, contre la tenue du salon du Bourget dans ces conditions, et contre la répression grandissante des défenseurs des droits des peuples visés dans ces recours (en témoigne la menace récente de dissolution d’Urgence Palestine), mobilisation menée notamment par la coalition Guerre à la guerre et la dynamique Stop Bourget, qui soutiennent cette démarche judiciaire.

Contacts presse :

Al-Haq,  joel.alhaq@gmail.com

Droits et Mouvements Sociaux, Droitetmouvementssociaux@proton.me

Survie, Survieparis@gmail.com

Coalition guerre à la guerre (qui regroupe une vingtaine de collectifs dont les Soulèvements de la Terre, Stop Arming Israel France, Urgence Palestine, la Marche des Solidarités)

Dominique Cochain, avocate et cofondatrice d’Avocats pour la Justice au Proche Orient (AJPO) dcochain@cabinetcochain.fr, qui représente les associations, aux côtés de Laura Monnier, Matteo Bonaglia, et Amélie Beauchemin


Note-s

  1. https://www.ipcinfo.org/ipc-country-analysis/details-map/en/c/1159596/[]
  2. https://www.ungeneva.org/fr/news-media/news/2024/12/101341/gaza-compte-le-plus-grand-nombre-denfants-a[]
  3. https://blogs.mediapart.fr/les-invites-de-mediapart/blog/040325/pas-d-espoir-de-paix-durable-sans-justice-des-juristes-du-monde-entier-se-mobilisent-p/[]
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