lundi 30 juin 2025

19:00

À Paris (19ème), Jazz for Palestine

La Petite Halle 211 Avenue Jean Jaurès 75019 Paris
jazzforpalestine À Paris (19ème), Jazz for Palestine

Evènement organisé par : LIGHT BLUE

Jazz for Palestine : ériger notre humanité en boussole

A la Petite Halle ce lundi 30, premier arrivé premier servi, essayez d’arriver tôt, la soirée commence à 19h30 ! En première partie, Michèle Sibony intervient pour l’UJFP aux côtés de Francoise Verges, Mathieu Rigouste et Wissam Xelka.

Cette tribune rassemble déjà plus de 1000 signataires. La soirée de soutien est organisée à la Petite Halle de la Villette, afin de recueillir des fonds qui seront reversés à des associations venant en aide à la population gazaouie.

Cette tribune a pour but de réunir les voix des artistes et travailleur·ses issus du monde du jazz et des musiques improvisées, autour d’une série de revendications urgentes en soutien au peuple palestinien et contre le génocide en cours à Gaza. Il y a des moments dans l’Histoire où l’on ne peut plus se taire sans être complice. Celui-ci en est un. Qu’est-ce que le jazz dit à la Palestine ?

De l’auto-censure des artistes

Avant d’entrer dans le détail des revendications, nous souhaitons partager un premier constat sur le caractère particulier de nos métiers et les implications sur nos comportements en ce qui concerne la diffusion de nos opinions politiques. Nous sommes bien conscients qu’en tant que personnes résidant dans le nord global, détenteur.ices de passeports européens, nous bénéficions d’un statut privilégié dans l’ordre mondial impérialiste dans lequel nous vivons. Cependant, à l’échelle de notre société, nous sommes pour la plupart des précaires, dont la subsistance dépend de notre intégration au sein d’une micro-économie complexe : artistes, programmateurs, journalistes, agents, clubs, bars, cafés, salles de spectacle, festivals, organismes de subvention et autres institutions. Dans ce contexte, parfois décrit comme une « gig economy », il existe une peur que l’expression publique de notre soutien envers des causes politiques se paie de conséquences matérielles et d’une précarité redoublée. Ce sentiment d’auto-censure latente est partagé par de nombreux artistes et travailleur.se.s des secteurs culturels.

Notre initiative, qui a pour but premier d’apporter son soutien à la population de Gaza et de réclamer l’arrêt du génocide en cours, veut également servir de plateforme pour réunir tous.te.s les artistes indigné.es par la situation, les sortir de l’isolement, les intégrer dans une démarche collective, et rompre le silence assourdissant des milieux culturels. Nous ne sommes pas seul.es ! L’union fait la force.

Nous avons conscience que nous ne sommes qu’une goutte d’eau dans un océan, mais à l’image de l’espoir qu’a suscité l’opération de la flottille de la liberté à travers le monde, et des nouvelles initiatives citoyennes qu’elle a engendrées, nous souhaitons contribuer également là où nous sommes et comme nous le pouvons, à faire en sorte que cet élan de solidarité et cette dynamique mondiale au sein des sociétés civiles puissent avoir un impact sur l’action de nos gouvernements qui ont une responsabilité majeure dans ce qui se joue. 

Le jazz, musique d’émancipation et de résistance des opprimés

Nous tenons également à rappeler notre attachement aux valeurs de résistance et d’émancipation des peuples opprimés qui sont à la racine de cette tradition musicale.

Cette musique dont nous nous réclamons, que certains appellent « jazz », d’autres « Black American Music », est issue d’une tradition qui prend ses racines dans la résistance et l’émancipation des noirs aux États-Unis. Elle est liée à l’esclavage, à la libération, au mouvement des droits civiques, contre l’oppression et pour l’égalité des droits. Une musique qui conteste l’ordre établi. Nombreux ont été les musicien.ne.s qui se sont engagés dans ces combats (Abbey Lincoln, Max Roach, John Coltrane, Charles Mingus, Nina Simone, la liste est longue…). Des combats qui étaient étroitement enchevêtrés aux luttes des peuples des pays colonisés par les puissances européennes en Afrique et en Asie.

En tant qu’Européens, nous avons parfois tendance à oublier, ou à dissocier (volontairement ou inconsciemment…) toute la dimension politique et spirituelle qui fait partie intégrante de cette tradition musicale, pour la traiter comme un pur objet esthétique, voire comme un simple bien culturel de consommation. 

Nous inscrivons les revendications qui vont suivre dans la continuité historique des luttes anti-colonialistes et anti-impérialistes pour l’émancipation des peuples contre leurs oppresseurs : de la révolution haïtienne, algérienne, vietnamienne, et de tous les peuples colonisés d’Afrique et d’Asie, de la lutte des sud-africains contre l’apartheid et bien sûr de la lutte des afro-américains aux États-Unis.

Nous ne voulons pas d’un monde dans lequel on tue les enfants

Nous demandons en urgence : 

  • Un cessez-le-feu immédiat et la fin du blocus humanitaire à Gaza
  • La reconnaissance de l’État palestinien par l’État français
  • La suspension de l’accord UE-Israël
  • L’arrêt immédiat des livraisons d’armes par la France (cf enquêtes de l’Humanité et de Off Investigation)
  • La fin de l’impunité d’Israël sur le plan international et la mise en place de sanctions économiques
  • La libération de tous les otages et la comparution des auteurs de crimes de guerre devant les instances de justice internationale

Nous dénonçons le caractère colonial de la politique de l’État d’Israel qui bafoue le droit international en toute impunité (colonisation des terres, contrôle des populations, emprisonnements illégaux, crimes de guerre, maintien d’un état d’apartheid qui ne garantit pas l’égalité des droits) avec le soutien des puissances occidentales (livraison d’armes, impunité face au droit international).

Il ne peut y avoir de paix sans égalité des droits sur ce territoire. Nous soutenons les palestinien.ne.s et israélien.ne.s qui se battent pour une alternative réellement démocratique, qui accordera les mêmes droits à tous les habitants de la région. 

Nous déplorons la faillite de nos États occidentaux, et en particulier de l’État français, qui a laissé éclater aux yeux du monde son double discours face au respect du droit international. Nous encourageons à la multiplication d’actions citoyennes comme l’opération de la flottille de la liberté, ou la marche organisée dans les pays du Maghreb afin de contraindre nos gouvernements à agir pour mettre fin à ces massacres de populations civiles.

Nous tenons à également exprimer notre solidarité et notre soutien à tous les juif.ve.s à travers le monde qui souffrent à la fois physiquement et psychologiquement de cette situation. L’antisémitisme est un fléau à combattre, dont nous déplorons l’accroissement encouragé aujourd’hui par la politique génocidaire menée par le gouvernement israélien, ainsi que par la complicité des Etats occidentaux qui entretiennent et relayent sa propagande.

Nous saluons le travail courageux mené par des organisations juives comme l’UJFP (l’Union Juive Française pour la Paix), TSEDEK, ou encore Jewish Voice for Peace aux États-Unis, ainsi que toutes les voix juives en France et dans le monde qui s’élèvent contre la politique du gouvernement israélien pour défendre des valeurs d’humanité, au prix de tensions au sein de leurs familles ou de leurs communautés.

Nous rappelons notre engagement contre tous les racismes : l’antisémitisme, la négrophobie, l’islamophobie, et toutes les formes de rejet de l’autre basées sur la race. Nous rappelons que la race n’est en aucun cas une catégorie biologique mais une construction sociale et historique fabriquée en Europe, intrinsèquement liée à la traite négrière et aux entreprises de colonisation, qui influence le destin social des individus et l’ordonnancement du monde depuis le XVIème siècle.

De la responsabilité des médias mainstream et de la classe politique au pouvoir

Nous souhaitons également dénoncer la couverture médiatique des médias mainstream français et de la classe politique au pouvoir, qui se fait le relai de la propagande du gouvernement israélien, et qui contribue à opérer une inversion totale des valeurs en faisant passer l’extrême-droite pour les nouveaux défenseurs des juif.ve.s, et la gauche antiraciste pour des antisémites.

Nous rappelons que l’antisémitisme est un racisme dont les racines sont profondément ancrées en Europe, qui a été le théâtre il y a seulement quelques décennies du massacre de près de 6 millions de juifs, par le régime nazi, et avec la complicité de l’État français sous occupation. Il s’agirait de ne pas avoir la mémoire courte.

Nous dénonçons la criminalisation d’État sans précédent qui a eu lieu ces derniers mois, envers les personnes critiques de la politique du gouvernement israélien et des soutiens à la cause palestinienne. Dans les universités, les manifestations, et plus récemment avec la dissolution scandaleuse du collectif Urgence Palestine. En relayant la propagande du gouvernement israélien, qui met un signe égal entre sionisme et judaïsme ou entre antisionisme et antisémitisme, et en refusant de mettre un terme à la livraison d’armes, l’Etat français se rend complice des agissements du gouvernement israélien et contribue à mettre en danger les juif.ve.s de France et du monde.

Nous condamnons également la banalisation des discours racistes, et d’une islamophobie décomplexée qui se déverse sans honte sur tous les plateaux de télévision et dans la bouche de nos ministres. On y instaure une atmosphère de soupçon permanent à l’égard d’une communauté, en érigeant la figure du « musulman » comme le nouvel ennemi de l’intérieur. La diffusion des théories délirantes du « grand remplacement » et l’emploi récurrent d’expressions comme « islamo-gauchisme » ne manquent pas de nous rappeler les théories complotistes et antisémites de la première moitié du XXème siècle invoquant le « judéo-bolchévisme ».

On étouffe, l’atmosphère devient irrespirable, et pendant ce temps, à quelques kilomètres, on tue à Gaza des dizaines de milliers d’enfants, femmes et hommes, au nom de la défense de la civilisation… Ce n’est pas un cauchemar, c’est bien la réalité… Comment avons-nous pu tomber si bas ?

Notre humanité comme boussole

Dans ce tumulte et ce chaos, on sent comme une odeur bizarre, les valeurs qu’on nous avait transmises se révèlent être des fictions, la France des droits de l’homme se rend complice de crimes de guerre tout en reniant sa ligne diplomatique historique. C’est bien l’odeur du flétrissement d’un modèle capitaliste et impérialiste en agonie, destructeur de l’environnement, et qui utilise l’économie de guerre et la tentation fasciste comme des derniers recours pour sa survie. Dans ce moment crucial, il nous revient de ne pas céder à la résignation et à nous lever pour exiger et construire un monde meilleur, fondé sur la justice, l’égalité, la solidarité, le partage, et l’amitié entre les peuples. 

Malgré tous ces signaux alarmants, nous constatons ces dernières années un nouveau souffle et de nouvelles solidarités au sein des mouvements de résistance citoyens des populations civiles à l’international. Des mouvements de nature et de degrés divers (les printemps arabes, Black Lives Matter, les gilets jaunes) qui ont contribué à la mise en circulation d’idées et encouragé de nouvelles connivences au sein des mouvements antiraciste, feministe, écologiste, queer, anti-impérialiste et anticapitaliste, qui dialoguent, s’influencent, et créent de nouvelles alliances afin de lutter contre la montée du fascisme et de la réaction sous toutes ses formes en Europe et ailleurs.

À l’heure où nos dirigeants, par leurs discours et leur inaction, exposent leur faillite morale à la face du monde, il nous faut faire bloc et répondre face à l’horreur, aux discours de haine, et ériger notre humanité en boussole. 

FREE PALESTINE


Signataires : voir les 1100 premiers sur l’article de mediapart, la liste sera mise à jour au fur et à mesure