Union juive française pour la paix

Témoignage d’Abu Amir, le 28 octobre 2025 – Quelle vie pour les jeunes Gazaoui.es ?

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Foto: @AimanofArabia

Les jeunes à Gaza : énergies réprimées et avenir incertain

Gaza… cette ville assiégée qui ne connaît de la vie que ses crises, et de l’avenir que ses ombres lointaines. Pourtant, elle abrite une jeunesse dynamique qui constitue plus de la moitié de sa population : des jeunes pleins de vitalité et d’ambition, mais qui se heurtent chaque jour à une réalité dure, emprisonnant leurs rêves comme les frontières enferment leurs corps. Parler des jeunes à Gaza, c’est parler d’une génération confrontée à des défis permanents – politiques, humanitaires, sociaux, économiques et psychologiques – mais dont les yeux continuent de briller d’un espoir plus fort que toutes les chaînes du monde.

Les défis humanitaires… une vie sur le fil du rasoir

Les jeunes de Gaza vivent au cœur d’une crise humanitaire étouffante, imposée par le blocus et les guerres successives. Chaque jour, ils se réveillent face à des coupures d’électricité, à une eau souvent impropre à la consommation, et à une cherté de vie qui épuise la capacité des familles à tenir bon. Dans un contexte d’insécurité et d’instabilité, accéder aux droits les plus fondamentaux – éducation, soins médicaux – devient un véritable parcours du combattant.

Les hôpitaux fonctionnent avec des ressources limitées ; les médicaments essentiels manquent souvent. Les jeunes blessés lors des conflits risquent de perdre la vie simplement parce que voyager pour se faire soigner est impossible ou presque. Quant à ceux qui ne sont pas touchés physiquement, ils portent en eux des blessures psychologiques profondes que le temps ne guérit pas : la peur, la tristesse et l’anxiété sont devenues des compagnons constants d’une génération qui n’a jamais connu d’enfance paisible ni d’adolescence stable.

Les défis politiques… des jeunes otages de la géographie

La complexité politique entourant Gaza donne aux jeunes le sentiment que leur vie est mise entre parenthèses indéfiniment. Les frontières fermées ne sont pas seulement géographiques : elles enferment aussi le futur.
La division politique palestinienne aggrave encore la situation et rend la participation des jeunes à la vie politique presque insignifiante, comme si leur voix n’était ni entendue ni prise en compte, alors même qu’ils sont les plus affectés par les décisions prises.

Le monde extérieur, lui, considère souvent Gaza comme un dossier diplomatique, et non comme une société vivante qui respire et rêve. Ainsi, le jeune de Gaza devient un citoyen prisonnier dans son propre pays : il ne peut voyager pour poursuivre ses études ou sa carrière, et il lui est presque impossible d’imaginer un avenir planifié avec confiance.

Les défis économiques… le chômage qui dévore les années

À Gaza, le chômage n’est pas un chiffre, c’est une tragédie grandissante. Les taux parmi les jeunes sont parmi les plus élevés au monde. Un étudiant sort de l’université pour découvrir que toutes les portes sont closes ; le rêve qui avait justifié les sacrifices de sa famille se transforme en fardeau psychologique.
Même les petites entreprises que certains tentent de créer souffrent du manque de ressources et de soutien. Mais, par nécessité, beaucoup se sont tournés vers le travail en ligne. Ils ont prouvé qu’ils pouvaient rivaliser malgré un Internet instable et des coupures d’électricité répétées. Le télétravail est ainsi devenu une petite fenêtre ouverte sur le monde, offrant à chacun un peu d’autonomie et la possibilité de se réaliser malgré l’étouffement économique.

Les défis sociaux… un lien fort qui forge la résilience

Malgré les difficultés, la société gazaouie garde un tissu social solide qui soutient les jeunes sur le plan psychologique et humain. La famille reste le principal refuge de sécurité, et grâce à elle, le sentiment d’appartenance demeure profondément enraciné dans la personnalité du jeune.
Le travail bénévole constitue aussi un exutoire : il permet de canaliser les énergies vers le service d’autrui, de redonner un sens à la vie, et de briser le cercle du désespoir par la solidarité.

Mais les pressions sociales sont aussi lourdes : beaucoup aspirent au mariage, à la création d’un foyer, mais les conditions rendent ces rêves lointains, parfois impossibles. Avec le temps, certains craignent de voir leur jeunesse s’écouler sans réaliser ces aspirations fondamentales.

Les défis psychologiques… les blessures invisibles de l’âme

Aucun jeune de Gaza n’échappe aux séquelles de la guerre : le souvenir d’un bombardement, la perte d’un proche, la peur de l’avenir. Ces traumatismes façonnent leur manière de penser et de percevoir la vie. Le soutien psychologique reste pourtant limité, poussant beaucoup à vivre leur douleur en silence, derrière des sourires de résistance.

Nombreux sont ceux qui trouvent refuge dans l’art : théâtre, écriture, peinture deviennent des remèdes à la souffrance, des moyens de préserver leur capacité à rêver. Même le sport prend une dimension de résistance : les matchs reprennent sur des terrains détruits à plusieurs reprises, mais toujours rebâtis par la détermination des jeunes.

L’éducation… l’arme qui ne tombe jamais

Dans l’un des tableaux les plus sombres de la guerre contre l’avenir, les universités de Gaza ont été largement détruites. Les bancs d’école, jadis remplis de passion, se sont transformés en décombres portant la poussière des livres et les rêves brisés des étudiants. Pourtant, la jeunesse refuse d’abandonner : l’apprentissage continue à travers des écrans, sous des tentes, dans des maisons détruites, entre les coupures d’électricité et le bruit des bombardements.

L’enseignement à distance n’est pas ici un luxe technologique, mais un acte de survie.
Chaque cours suivi dans ces conditions est une forme de résistance, une petite victoire sur le temps et la mort. Les jeunes considèrent le savoir comme une arme ultime, qu’il ne faut jamais laisser tomber ; l’abandonner, ce serait céder au désespoir – ce que les Gazaouis refusent de faire.

L’espoir… le seul carburant inépuisable

Malgré tout, l’espoir demeure le compagnon fidèle des jeunes de Gaza. C’est lui qui les pousse à recommencer à zéro mille fois, à transformer les ruines en lieux de vie, à écrire leur avenir de leurs propres mains malgré les obstacles. Ils voient dans chaque pierre détruite un projet de reconstruction, dans chaque impasse une idée nouvelle, et dans chaque nuit sans fin une aube prochaine.

L’avenir de Gaza ne se construira ni uniquement par les décisions politiques, ni par les aides temporaires, mais par le travail et la détermination de sa jeunesse. Ces jeunes sont la véritable richesse de Gaza ; sans eux, il n’y a ni relèvement ni vie. Leur donner une chance n’est pas une faveur, mais un droit, un devoir moral et humain.

L’avenir reste incertain… mais cette génération a appris à faire jaillir la lumière du cœur des ténèbres. Leurs énergies sont peut-être réprimées, mais si elles venaient à se  libérer, elles émerveilleraient le monde.
À Gaza, rien n’arrête le rêve. Et à Gaza… l’espoir renaît chaque jour.

(Voir aussi les chroniques et articles postés par Brigitte Challande du Collectif Gaza Urgence déplacé.e.s quotidiennes sur le site d’ISM France et du Poing, article hebdomadaire sur le site d’Altermidi, et sur l’Instagram du comité Palestine des étudiants de Montpellier..)

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